C'est un beau roman

Pourvu que ça brûle : autoportrait enragé de Caryl Ferey

Dans la série « confidences », j’ai cru pendant un bon moment après avoir lu Zulu que Caryl Ferey vivait en Afrique du Sud et était un auteur étranger avant d’apprendre qu’il avait grandi en Bretagne : ). Si l’écrivain se documente beaucoup et longtemps pour écrire ses romans, il a aussi besoin de partir sur place et de rencontrer des gens, de s’immerger dans les habitudes du pays qu’il a choisi comme cadre pour nourrir et donner sens à son œuvre.

Avec Pourvu que ça brûle, l’écrivain nous invite donc dans l’antichambre de la création littéraire et c’est d’autant plus intéressant quand on a déjà lu la fiction dont il explique la genèse, les développements, les ratés parfois, l’aboutissement. Ainsi ce monastère où se tient les scènes finales de Mapuche, Caryl Ferey nous explique, alors qu’il n’arrivait pas à trouver un dénouement à la hauteur, qu’il a rêvé de ce lieu. De même, ses personnages de papier existent vraiment en Argentine, en Afrique du Sud ou au Chili même s’ils sont plus une source d’inspiration que des copies conformes.

Le livre est l’autoportrait d’un homme écorché vif, qui n’a de cesse dans les pays qu’ils traversent de s’intéresser aux peuples victimes de la barbarie et de l’histoire. Un intérêt sincère qui dépasse largement celui de l’écrivain, un intérêt qui devient quasiment une cause même si ces romans ne versent jamais dans l’idéologie. Rencontrant une des mères de la place de Mai (dont les enfants ont « disparu » assassinés pendant la dictature) ou un descendant de la tribu oglagla massacré par les américains lors du Wounded Knee, il est animé par la même révolte, rage et tristesse.

Nous sommes tous liés les uns aux autres.Quand un peuple disparait, c’est une autre façon de penser le monde qui disparait, complémentaire, peut être salvatrice, et je ne suis pas sûr que s’enrichir coûte que coûte en salopant la terre qui nous fait vivre soit la manière la plus fine.

J’ai appris grâce à Anne Laure qu’il avait déjà écrit un autre autoportrait dont le titre, Comment devenir écrivain quand on vient de la grande plouquerie internationale  laisse supposer l’humour. On sourit ici des surnoms qu’il donne à tous ses proches « Loutre bouclée » « Clope Dur » « Chorizo Bouillant » « Le libraire qui disait que c’était nul »  ou de son regard décalé sur le Festival de Cannes alors qu’il monte les marches pour le film Zulu (film que je n’aurais jamais pu voir s’il est aussi violent que les livres de Caryl Ferey, même si la violence chez lui n’est jamais gratuite et reflète malheureusement des faits réels).

Carnet de route, autoportrait, coulisses de la vie d’un auteur, Pourvu que ça brûle montre aussi avec force comment l’écriture peut sauver la vie d’un homme  :

Le futur libraire à qui je fis lire le manuscrit trouva ça nul mais je m’en fichais. J’en écrirais d’autres, sûr de ma destinée. A vrai dire, je n’avais pas le choix. C’était vivre libre ou mourir comme un coquelicot arraché.

Avez vous déjà lu cet auteur ?

5 Comments

  1. Ha oui c’est un de mes chouchou
    Que j’ai eu l’an chance de rencontrer chez Gallimard
    Il avait raconté la genèse de certaines de ses œuvres
    Il était pétulant et drôle 🙂

    Je pensais aussi qu’il était très exotique et ai ete étonné qu’il soit normand !

    • je me demande s’il est aussi « entier » en vrai qu’il n’a l’air dans ce livre
      et cela me rassure que je ne sois pas la seule à m’être trompée sur ses origines )

  2. Je ne le connais que de nom, je n’ai pas eu l’occasion de le lire. C’est étrange parfois l’idée que l’on se fait des gens 😉

    • il décrit tellement bien l’environnement, les conditions sociales que je ne me suis même pas posée la question de sa nationalité (et puis il a un prénom peu courant en France )

Laisser un commentaire

Ce site utilise Akismet pour réduire les indésirables. En savoir plus sur comment les données de vos commentaires sont utilisées.