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Mon sous-marin jaune : Dans la tête de Jón Kalman Stefánsson enfant

J’ai attendu plusieurs semaines avant d’ouvrir le dernier roman Mon sous-marin jaune parce que lire Jón Kalman Stefánsson est comme être témoin d’une aurore boréale pour moi. On a envie que ce moment ne finisse jamais, on s’y prépare pour mieux le savourer et puis on se dit qu’il faudra attendre peut-être longtemps avant d’en revoir une autre.

Mon sous-marin jaune n’est pas mon titre préféré de Jón Kalman Stefánsson. Si vous me demandiez à l’instant précis par quel livre de l’auteur et poète islandais commencer, j’hésiterais entre Asta et Ton absence n’est que ténèbres, mes deux préférés. Pourquoi ai-je moins aimé ce roman que les précédents alors que c’est visiblement le plus personnel, le plus autobiographique ? Je crois d’abord que j’ai un souci d’adhésion en règle générale avec les livres à hauteur d’enfant (je pense en particulier à La vie devant soi de Roman Gary que j’ai abandonné très vite car je n’arrivais pas du tout à rentrer dans le livre alors qu’il est si souvent cité comme grand classique). Mon sous-marin jaune invite aussi beaucoup le lecteur dans l’imagination de l’enfant, c’est probablement le roman le plus loufoque de Jón Kalman Stefánsson et cela m’a moins emporté qu’habituellement.

« La tristesse est une braise dans mon cœur »

J’ai par contre été beaucoup touchée par le récit de la mort de sa mère alors qu’il a 6 ans et toutes les conséquences que cela va avoir sur sa vie. La perte ne cessera de le hanter (écrire ce livre est-ce une façon de la laisser enfin partir ?) et j’ai noté à ce sujet quelques phrases que j’ai trouvées trop belles pour les garder pour moi :

Le passé ne passe jamais, il nous colle à la peau et refuse de nous lâcher. Il est dans tout ce que nous faisons, pensons, ressentons, pourtant il ne revient pas.

Lorsque toutes les issues sont condamnées, lorsque le coeur est lacéré, quand tous les ponts sont brûlés ou effondrés, les routes disparues ou devenues impraticables, les larmes et les caresses sont sans doute les seules choses qui puissent aider ceux qui sont incapables de parler.

La perte est aussi celles de Sesselja et Gudmundur, ce couple de voisins âgés chez qui il se réfugie d’un père taiseux et parfois violent. Tous les passages les concernant sont magnifiques.

Petits plaisirs Stefánssoniens

Il me semble que grâce aux superbes traductions d’Eric Boury, j’ai lu aujourd’hui tous les romans de Jón Kalman Stefánsson. Cela me donne le privilège de pouvoir dessiner des ponts entre eux, de trouver des échos et d’en dégager une liste de petits plaisirs de lecture :

  • la découverte de ses sous-titres à l’intérieur de chaque chapitre si « Stefánssoniens »
  • ce savoureux mélange de mélancolie, de nostalgie et d’humour
  • la place des livres et l’importance des mots dans le destin de ses personnages
  • l’importance des lettres manuscrites (à chaque fois je regrette de ne plus en envoyer ni recevoir)
  • l’impression d’être transportée dans ces paysages hostiles de froid et de neige
  • brancher son casque et chanter à tue tête Da ya think I’m sexy ? (j’avoue je préfère cette chanson et la fabuleuse I’m sailing qui me colle des frissons à chaque fois à celles des Beatles ).

Si vous voulez savoir quelle est l’importance de cette Trabant, voiture présente sur la photo, si vous voulez savoir pourquoi l’écrivain aime autant les Beatles, si vous vous demandez comment la vie personnelle de l’auteur a influencé son oeuvre, il ne vous reste plus qu’à entrer à votre tour dans Mon sous-marin jaune.

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