C'est un beau roman

S’enfuir, récit d’un otage de Guy Delisle

Christophe André est responsable des finances et de l’administration d’une ONG dans le Caucase, c’est sa première mission humanitaire quand il est enlevé dans la nuit du 1er au 2juillet 1997. Au départ, enfermé dans une pièce avec une fenêtre obstruée, une ampoule au plafond et un matelas, il pense n’en avoir que pour quelques jours avant d’être libéré. Mais le temps passe, rythmé par les mêmes micro-événements (on lui apporte un bol de soupe et un mug de thé deux fois par jour, un de ses ravisseurs l’emmène aux toilettes) et il est toujours au même endroit.

Pour ne pas perdre la notion du temps (il essaie de se repérer aux bruits et aux moindres détails), il égrène le calendrier dans sa tête, voyant défiler semaine après semaine (quand il a l’occasion de voir la date du jour écrite sur un journal, il réalise que ses calculs sont bons !).

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Pour ne pas devenir fou d’ennui et (de désespoir), il rejoue dans sa tête toutes les étapes des grandes batailles napoléoniennes qu’il connait visiblement par cœur.

Difficile de savoir si le recul dont il fait preuve assez souvent voir même un certain humour dans des situations particulières (au téléphone avec un membre de l’ONG il affirme qu’il ne faut pas payer la rançon réclamée car c’est beaucoup trop et qu’il peut encore tout à fait patienter) reflète la façon dont il a vraiment vécu ces mois de captivité ou s’il s’agit de la patte de l’auteur.

Ce qui est certain c’est que Guy Delisle a su parfaitement retranscrire le quotidien d’otage de Christophe André (ils se sont rencontrées il y a une quinzaine d’années, sont devenus amis et l’auteur l’a enregistré pendant 2 jours), ses pensées, son environnement, jouant sur les couleurs pour montrer l’alternance de jour et de nuit, répétant les mêmes scènes qui montrent avec puissance quelle impression de vide face à l’attente on peut ressentir.

On pourrait penser que lire 400 pages d’une histoire où chaque jour ressemble à l’autre est ennuyeux mais c’est tout le contraire car Guy Delisle a su allier la force du dessin et du texte, il montre avec une sensibilité remarquable tout ce que ressent cet otage et créé un suspense au fil des pages.

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Il était très bon pour raconter son histoire (je pense à Chroniques de Jérusalem, je n’ai pas encore lu ses autres titres), il est également très doué pour transmettre celle d’un autre.

Être otage, c’est pire qu’être en prison.
Au moins, en prison, tu sais pourquoi tu es enfermé.
En prison, tu connais le jour où tu vas sortir, la date précise…

Alors qu’ici je peux juste compter
les jours qui sont passés sans savoir
quand ça va s’arrêter.

 

 

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9 Comments

  1. J’ai lu plusieurs chroniques sur cette BD, j’ai très envie de la lire et de me plonger dans l’histoire qui a l’air merveilleuse.

  2. il fait partie des livres de la rentrée que j’ai très envie de lire, notamment car j’adore cet auteur et que le sujet parait passionnant.

  3. Je suis un grand fan de Guy Delisle! Je pense avoir tout lu de lui! Ou il m’en manque peu! Donc il me tarde de lire celui-ci!
    Je l’ai découvert avec Pyongyang puis Shenzen. Je trouvais qu’il savait capter les petits détails sans tomber dans la caricature de l’occidental en Asie. Il évitait les clichés, parlait de tout ça avec une naïveté intelligente. Puis avec Chroniques Birmanes et de Jerusalem, il a passé un cap. Il est devenu incontournable.
    Mais comme je rentre de vacances, j’ai pas encore lu sa dernière oeuvre! Je me le procure très vite et je te dis ce que j’en pense!

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