Parler d'ma vie

Avant j’étais bibliothécaire…

Je n’avais pas de chignon, ni de lunettes triple foyer, je ne vivais pas seule avec mes chats mais quand il m’est arrivé sur feu caramail d’annoncer mon boulot, je sentais comme un blanc par écran interposé. L’image de la bibliothécaire dans les fictions, romans ou télé, c’est souvent celle de la vieille fille acariâtre entourée de ses boites d’archives et qui, sortie de ses bouquins, est un peu asociale. Avouons qu’en tant qu’étudiante, j’ai rencontré ce genre de spécimen, portant sur les épaules, été comme un hiver, ces étoles pas très glamour et répondant à la moindre question d’un ton antipathique qui ne donnait pas envie de revenir. N’empêche que je n’ai jamais compris pourquoi la figure de la libraire est bien plus idéalisée, fantasmée (version homme, Notting hill; version femme Les adoptés) que celle de la bibliothécaire.

Peut-être parce qu’elle est vue comme celle qui pousse son chariot pour ranger les livres en rayon, celle qui fait « chut » un doigt sur la bouche quand le niveau sonore augmente un peu tout en prenant un air de maîtresse d’école, celle qui attend les questions des lecteurs derrière des bureaux trop imposants et intimidants. Pourtant bibliothécaire c’était bien plus que ça : j’ai sélectionné des livres, j’ai lu beaucoup de nouveautés, j’ai réfléchi à la façon de présenter, de mettre en avant physiquement ou virtuellement pour que les lecteurs aient envie d’emprunter autre chose que le dernier livre dont tout le monde parle, j’ai bossé sur un programme d’animations avec les filles de mon équipe, j’ai rencontré des intervenants, j’ai répondu à des questions d’internautes pour le service novateur à l’époque du Guichet du Savoir (jetez un oeil par curiosité si vous ne connaissez pas ) et tant d’autres choses encore.

Pas de vision idyllique de ce passé proche professionnel, j’ai aussi exécuté tout un tas de tâches très ennuyeuses et j’ai connu, en 11 ans de métier trop souvent un sentiment pénible d’inutilité. Est-ce le fait d’organisations où le travail est tellement parcellisé qu’il est forcément déprimant? ce qui m’a manqué le plus c’est l’absence de créativité surtout hors lecture publique.

Je ne me présente plus comme bibliothécaire mais je sais chercher dans les catalogues mieux qu’un non initié, j’ai toujours le même goût à partager mes lectures (mais je lis nettement moins), je regrette de plus pouvoir parcourir la revue Livres hebdo, si l’occasion se présentait, former du personnel de bibliothèques aux blogs et réseaux sociaux ne me déplairait pas. Bref j’ai changé de voie mais je n’ai pas tout effacé.

Je garde un seul séquelle, l’impossibilité de travailler autrement qu’en silence mais promis si je vous prête un livre, je n’écrirai pas votre nom sur un fiche bristol et je ne vous demanderai pas de ne pas réparer le livre vous-même si vous l’abîmez )

Et vous, quelle image avez-vous des bibliothécaires ?

53 Comments

  1. C’est qu’il y en a des coincées comme tu décris au début ! à la bibliothèque de ma ville, elles sont dynamiques et serviables, donc ça va ! c’est un beau métier, je trouve. Enfin elles avaient sûrement une mission plus importante autrefois. j’aime les bibliothèques !

  2. Tu sais qu’à une époque je rêvais d’être bibliothécaire (je crois que cela me plairait toujours de le faire)….cela en dit long sur l’image que j’ai d’elle.

    • c’est un beau métier mais pas parfait (comme celui de libraire aussi d’ailleurs que j’ai toujours idéalisé alors qu’il faut passer beaucoup de temps à la compta )

  3. Les bibliothécaires ont changé !

    Bon pour le coup de la libraire, ça doit être le fantasme de la fille jugée sur la girafe, je vois pas sinon.

    Moi j’adore ma bibliothèque de l’Alcazar : pré-réserver sur le net, passer comme au drive prendre mes résas, flâner au rayon jeunesse … et personne ne dit Chut.
    Par contre à l’accueil on sent que le personnel a besoin de parler outre le « bonjour, votre carte, bon choix, au revoir ». Ca doit être frustrant mais ils changent de poste dans la journée, ouf !

    • tu sais qu’en cherchant une illustration pour ce billet, j’ai vu que la bibliothécaire pouvait être le même sujet de fantasme que celui de la libraire, un gros la fille un peu coincée avec ses lunettes mais qui a des porte-jarretelles sous sa jupe plissée )
      tu cites une bibliothèque que je trouve très moderne, pour l’avoir visité en tant que professionnelle, c’est une des premières à avoir mis des automates de prêt par exemple et elle a toujours été dynamique…et je te rejoins sur l’accueil, c’est très frustrant car il faut aller vite donc la relation humaine est limitée d’où la nécessité pour moi de réduire ce temps de présence au profit d’autres tâches plus intéressantes (mais quand c’est dans les habitudes du métier, on s’y accroche parfois)

  4. A vrai dire je ne me suis jamais posé la question et je ne m’imagine rien. L’image que tu donnes de la bibliothécaire en début d’article me semble bien loin, ancienne en tout cas… un peu comme les anciennes instits…. et sans être dans cette branche moi aussi j’aime travailler dans le silence… total si possible 😉

  5. Vu qu’en ce moment je travaille avec des bibliothécaires, j’en ai une vision un peu plus dépoussiérée (mais heureusement, ça datait déjà d’avant) !

  6. C’est marrant, quand on me dit biblothécaire, je pense plutôt : contact humain, conseil littéraire, passion de la lecture, lieu de travail inspirant et serein…
    Ce métier me fait rêver, en fait! Le calme qu’il inspire, mais surtout les relations aux autres, la transmission de sa passion pour les livres.
    Mais bon, dans ma ville, les bibliothécaires sont plutôt sympa et pas spécialement austères, ça doit aider! 😉

    • je n’ai pas dit que les bibliothécaires étaient austères (je parlais de leur représentation dans les films, dans les livres), j’ai eu une grande majorité de collègues dynamiques, ouvertes, disponibles avec le public comme ceux de ta ville )
      après le métier de bibliothécaire est très différent d’une bibliothèque à l’autre et tu peux tout à fait être bibliothécaire sans jamais donner de conseil littéraire par exemple (cas en bibliothèque universitaire)

    • c’est vrai que c’est un métier où les livres sont très présents mais il y a aussi beaucoup de travail interne (d’où le fait que les bibliothèques ne sont pas ouvertes tout le temps, fait en général assez compliqué à faire comprendre au public d’ailleurs)

  7. J’ai pu rencontrer une ou deux caricatures, mais on pourrait dire cela dans tous les métiers.
    J’ai une bonne image de toutes celles qui m’ont transmis l’envie de lire un livre, qui m’ont aidée à trouver un ouvrage tout en m’en conseillant un autre an complément.
    J’ai rencontré certains puits de sciences très ouverts, très intéressés par les autres… et très baba cool aussi. Il faut dire que j’y ai pas mal traîné, dans les bibliothèques. J’aimais leur atmosphère… je ne sais pas comment dire… presque protectrice du lecteur.

    • il n’y a que 25% des gens en France qui fréquentent les bibliothèques (je ne parle pas des bibliothèques universitaires mais municipales), donc il reste à convaincre tous ceux qui n’y mettent jamais les pieds qu’il y a des choses intéressantes pour eux, et pas que des livres )

  8. Tu sais ou tu ne le sais pas, aujourd’hui je travaille entourée de bibliothécaires et je t’avoue avoir pensé à toi bien des fois… et ton billet est comment dire…tellement vrai que j’envoie le lien à mes responsables (bibliothécaires !) Il y a tellement à faire dans ce domaine qui pour moi est comparable au métier de journaliste, dans la mutation a opérer ! Bonne chance Virginie !

    • oui j’étais au courant et je te rejoins à 100% sur cette évolution du métier qui devrait tendre vers un médiateur de l’information (idée soutenue par Patrick Bazin, peut-être que tu peux trouver des articles de lui en allant voir sur le site de l’enssib, il a été directeur de la BM de Lyon avant de partir à la BPI)…les catalogues ont évolué, sont plus intuitifs mais pour moi on n’est pas allé au bout de la logique, pourquoi ne pas proposer des fonctionnalités comme sur les catalogues de librairies en ligne (vous aimez ça ? vous aimerez aussi ça par exemple)….l’automatisation de certaines tâches (prêt-retour avec les automates de prêt) devrait permettre aux bibliothécaires de se consacrer à des tâches qui me semblent plus intéressantes (car dans une grosse bibliothèque, quand on est en banque de prêt/retour, le contact avec le public est limité, il faut aller vite pour que la file d’attente ne devienne pas immense) …enfin il y aurait tant à dire ) …Bonne chance dans ton nouveau poste !

      • Le projet que tu défends si justement est en cours de réalisation dans mon réseau, l’automatisation des prêts-retours afin que les bibliothécaires puissent se libérer etc etc… mais après/pendant il faut que les mentalités évoluent aussi… on m’a répondu suite à la diffusion de ton billet, le hic c’est que les personnes qui deviennent bibliothécaires aiment les livres avant tout, pas forcément les gens/contact ! oups ça fait réfléchir !

        • la résistance au changement est normale, il faut expliquer, rassurer, prendre le temps d’écouter les craintes, montrer d’autres bibliothèques avec ce système (Alcazar pas loin de chez toi)…en effet aimer les livres ne suffit pas, c’est bien une chose que j’ai entendu maintes fois en passant le concours comme en formation, c’est un métier de contact, de service public

  9. Voilà un billet qui me parle beaucoup 😉
    Des bibliothécaires poussiéreuses, ne nous voilons pas la face, il y en a encore beaucoup ! Le boulot change se transforme mais il reste toujours ces petites tâches ennuyeuses et pénibles… Bref, même si j’aime mon métier, j’ai dû mal à me projeter à très long terme et voir des collègues bibliothécaires se lancer dans d’autres voies comme toi me fait rêver !
    Merci 🙂

    • ah toi qui n’est pas côté public tu sais de quoi je parle )
      globalement je trouve ça difficile de faire le même métier toute sa vie …après je serais restée en lecture publique je n’aurais peut-être pas eu envie de changer mais « on » m’a dégoûté de l’univers des bibliothèques avec un poste très administratif…j’espère que le métier bougera malgré les résistances (normales) au changement

  10. J’ai une bonne image des bibliothécaires ,dans notre petite ville la nôtre est sympatique,bavarde elle donne envie d’entrer et de revenir!

  11. Moi, le métier de « bibliothécaire » me fait juste rêver… Etre 8h par jour entourée de livres et de silence… quel bonheur ! Bon, apparemment, j’idéalise un peu ce boulot d’après ton article…

    • et moi je me rends compte en lisant vos coms que finalement le métier de bibliothécaire est aussi idéalisé que celui de libraire )

  12. J’aurais aimé ce métier ! j’aurais aimé conseiller les gens et échanger sur les livres comme je le fais sur les films 🙂

    • c’est un aspect du métier très chouette mais c’est finalement assez peu de temps sur tout le reste (on alors dans les toutes petites bibliothèques)

  13. C’est un métier que j’aime et que j’ai toujours beaucoup respecté. A vrai dire je ne me suis jamais posé la question mais je pense que c’est un métier en pleine mutation depuis quelques années et ce n’est pas terminé… merci pour cet article bien intéressant de par ton expérience 🙂 Bisous.

    • les tâches changent c’est certain (les fiches bristol dont je parle à la fin par exemple ça n’existera plus dans quelques années même dans les petites bibliothèques)

  14. ça me fait assez rêver comme boulot ! les livres et la calme !! (moi qui bosse avec 26 élèves !!…)
    Ceux de la biblio où je vais sont ouverts passionnés et toujours prêts à t’aider un bouquin qui te conviendra : j’adore !!

    • euh calme ça dépend (va en secteur jeunesse un mercredi ou un samedi c’est pas forcément calme ))

  15. j’ignorais que c’était ça ton ancien boulot!!! pourtant j’avais bien pigé que tu bossais dans la fonction publique.
    Moi je les aime mes bibliothécaires puisque nous allons très très souvent à la médiathèque. Ce que j’aime moins c’est qu’elles se plaignent souvent de leur boulot: conditions, horaires de travail (c’est ouvert le dimanche). Je crois que j’idéalisais ce métier sans vouloir voir les contraintes…

    • je comprenne qu’on puisse râler de bosser les dimanches si cela n’est pas compensé d’une manière ou d’une autre parce que pour la vie de famille c’est pas top quand même…quand je bossais à la bibliothèque nationale de France, je bossais 5 week-end complets par an parce qu’on était assez nombreux pour faire un roulement (et aussi pas mal de vacataires) et c’était compensé par le fait qu’on récupérait 1 jour de plus .du coup ça valait le coup )
      (et sinon mon cv est en ligne dans la colonne de droite en haut, et tu sauras tout sur ce que j’ai fait professionnellement jusqu’à aujourd’hui) )

  16. Comme j’ai pas mal fréquenté les bibliothèques dans ma jeunesse, autant dire que les bibliothécaires ont fait partie de mon paysage quasi quotidien mais si je parle de « paysage », c’est justement que moi je les trouvais trop discrètes… pourquoi ne pas échanger une petite phrase quand on se voit si souvent…? Le silence est trop sacré dans les bibliothèques en fait 😉

  17. L’image des bibliothécaires a semble-t-il évolué depuis quelques temps ; et la caricature de la vieille bigote en jupe grise au regard sévère derrière ses doubles foyers parait désormais bien éloignée de la réalité. C’est tellement vrai qu’aujourd’hui beaucoup de jeunes expriment le désir de travailler en bibliothèque ; mais désormais ils s’en font une idée presque trop idéale. Je le sais par expérience (c’est dans une bibliothèque que j’ai eu la chance et l’honneur de rencontrer notre chère chocoladdict !). Le métier n’est pas si calme et si reposant qu’on croit – dans les bureaux, en tout cas, l’ambiance est identique à celle de n’importe quelle administration (c’est-à-dire, dans le contexte actuel de la RGPP, globalement assez pourrie). D’autre part il est assez peu question de « conseil au lecteur », de lecture ou de partage d’une passion pour les livres. En bibliothèque universitaire, cela n’existe pas du tout, et dans les bibliothèques municipales, cela doit être également plutôt rare. Les situations sont toutefois très disparates, selon le type de bibliothèque, la fiche de poste et l’environnement humain.
    Pour ce qui est de la modernisation du métier, je ne partage pas tout à fait les avis exprimés ci-dessus, du moins je me demande quel sens peut avoir cette idée de modernisation pour des structures comme les bibliothèques, dont la finalité est d’abord de conserver le patrimoine écrit de l’humanité. Mais c’est un vaste débat !

    • on en a quand même connu des caricatures souviens toi )
      en ce qui concerne la modernisation, je ne vois pas cela comme étant antinomique à la conservation du patrimoine, il y a même des exemples dans certains musées et bibliothèques dynamiques de valorisation du patrimoine grâce à des outils « modernes ». Je m’interroge aussi sur le fait de placer au coeur de ce métier, le catalogage plutôt que la médiation et la valorisation des contenus. Mais peut-être que si je suis partie, c’est que j’étais en décalage…

  18. Certains collègues répondent en effet plutôt bien à la caricature, parce que la caricature a du vrai ! Il est inévitable que le métier de bibliothécaire attire certaines personnes un peu hors de la vie ou légèrement asociales.
    Je me méfie de tout ce qu’on appelle modernisation, dans les bibliothèques et ailleurs. C’est par exemple à l’informatisation totale que l’on doit le travail sur écran abrutissant des « catalogueurs », et pour nous qui sommes passés à la BnF, nous n’ignorons pas les aspects négatifs de la modernité à tout prix. Bien sûr, cela ne veut pas dire que les choses doivent rester immobiles – changeons, mais avec prudence.

  19. Hum, ne me rends pas trop nostalgique, s’il-te-plaît, je suis toujours dresseuse de gremlins à plein temps … et je n’ai même pas commencé à chercher un nouveau poste, de préférence dans une toute petite bibliothèque … hihihi !
    Bises !

  20. J’en ai connu plusieurs, de bibliothécaires. Celle du genre froides, et antipathiques bien stéréotypée comme tu l’as si bien décrit : qui ne donne pas du tout envie de lire, mais à l’inverse de sortir en courant de son antre.
    Et puis j’ai connu ma bibliothécaire. Celle de la bibliothèque de mon enfance, de mon adolescence. Je pouvais passer des heures là-bas. J’y ramenais ma famille, qui se mettaient aux-mêmes à bouquiner, à discuter avec la bibliothécaire. Celle-ci de très bons conseils, toujours souriante, et à l’affût de la dernière nouveauté qui pouvait me plaire.
    Etant une grosse consommatrice de livres, je n’ai pas la même opinion en ce qui concerne « la bibliothécaire », comme partout il y en a des biens et des moins biens, il faut juste ne pas rentrer dans les clichés.

    • je parlais plutôt du cliché qu’on a certaines personnes quand tu prononces le mot bibliothécaire plus qu’une réalité )

  21. Je fais actuellement des études de bibliothécaire-documentaliste à Bruxelles (Belgique) et j’ai une (forcément) une super image des bibliothécaires, mais ceux de la nouvelle génération. Ceux qui aiment faire des animations, aller vers le public, mettre tout un de marketing autour de la bibliothèque et autres …
    Certes beaucoup de personnes généralisent trop souvent le métier de bibliothécaires au simple prêt, c’est bien plus que ça !
    Et je suis contente d’avoir pu lire votre ressenti vis à vis de ce métier, merci !

    • ah je suis bien d’accord le métier de bibliothécaire est bien plus riche que le simple prêt de documents (partie la plus visible pour le public)
      bonnes études et bon courage pour la suite !

  22. Bonjour
    J’aimerais être bibliothecaire mais j’ai assez peur.
    Je suis artiste et je me dis que je pourrais avoir la stabilité financière et faire ce que j aime comme le conte, des heures animations…
    Mais j’ai peur de tomber sur une équipe qui s’en fiche, que mon travail ne soit que ranger, que l’ambiance soit pourrie…
    C’est un métier où c’est dur d’y rentrer avec peu de débouché donc une fois dans le métier, pas envie de changer à cause de désillusion, autant essayer de vivre de mon métier d’artiste et ne pas avoir de regret et être prof de théâtre carrément.

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